Perspectives de l’économiste en chef Eugenio Alemán pour 2024

Eugenio Alemn, économiste en chef, revient au balado pour discuter avec Chris Cooksey de ses perspectives pour 2024. Ils abordent notamment les points suivants :
- Où en sommes-nous dans le cycle économique
- À quoi peut-on s’attendre en 2024
- Quelles sont ses inquiétudes en lien avec l’économie
- L’inflation et les taux d’intérêt
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Transcription
Chris Cooksey : Bonjour et bienvenue à L’investisseur avantagé, un balado de Raymond James Limitée, qui offre une perspective aux épargnants canadiens qui veulent rester informés et concentrés sur le succès à long terme. Nous enregistrons cet épisode le 6 février 2024. Je m’appelle Chris Cooksey et je travaille au sein du service Communications d’entreprise et marketing de Raymond James. Nous accueillons aujourd’hui Eugenio Aleman, économiste en chef à Raymond James Financial, qui va nous donner un aperçu de l’actualité économique. C’est un plaisir de vous retrouver dans ce balado, Eugenio. J’ai fait quelque chose que je n’aurais pas dû faire : j’ai regardé le temps qu’il faisait à St. Pete, et même s’il ne fait probablement pas aussi chaud que ce à quoi vous êtes habitués, la température y est nettement plus élevée qu’ici, à Toronto. Cela étant dit, c’est toujours un plaisir de discuter avec vous. J’espère que vous vous portez bien.
Eugenio Aleman : Oui. C’est une belle journée. 59 degrés. C’est le temps idéal.
Chris Cooksey : Quelle chance! Inutile de vous préciser que nous avons comme toujours de nombreux sujets économiques et connexes à aborder aujourd’hui. Peut-être pourriez-vous commencer par nous faire part de vos réflexions sur l’état du cycle économique à l’approche des élections américaines et sur les nombreux événements qui agitent le monde?
Eugenio Aleman : Oui. Nous sommes toujours dans une période de récession très légère. La raison est que le taux de la Réserve fédérale va encore osciller entre 5,25 et 5,50 % pendant plusieurs mois. Ainsi, si l’inflation continue de baisser, ce que nous prévoyons, le taux d’intérêt réel continuera d’augmenter. Il existe donc toujours un risque que nous entrions en récession si la Réserve fédérale venait à maintenir ce taux pendant trois, quatre ou même cinq autres mois. À ce jour, rien ne semble indiquer que l’économie américaine suive cette voie. Mais là encore, plus la Réserve fédérale tarde à baisser les taux d’intérêt, plus il est probable que les consommateurs et les investisseurs réagissent et qu’un ralentissement en découle. Nous sommes néanmoins à deux doigts d’éviter la récession à l’heure actuelle. Nos prévisions font état d’une récession tellement légère que nous en venons à penser que nous pourrions ne pas connaître de récession de sitôt. Autrement dit, le cycle politique est le cycle politique. Je ne m’étendrai pas sur le fait qu’Ed Mills a participé au dernier épisode et je ne vais pas marcher sur ses plates-bandes, mais l’économie se porte bien, merci. Jusqu’à présent, pas moins de 353 000 emplois ont été créés en janvier. Cela signifie que la croissance du revenu s’accélère et qu’en raison de la baisse de l’inflation, le revenu réel augmente. Jusqu’ici, tout va bien. La Réserve fédérale n’est pas encore disposée à baisser les taux d’intérêt et c’est là le plus grand risque, car elle n’est pas convaincue de pouvoir ramener le taux d’inflation à son niveau de 2 %. Elle redoute une stagnation du taux d’inflation à 3 % et veut être certaine de pouvoir le réduire à 2 % avant de commencer à réduire les taux d’intérêt. Nous pensons que la Réserve fédérale réagira pour la première fois en juin, mais c’est impossible à affirmer avec certitude pour l’instant, et la possibilité d’une mesure en mai reste sur la table. Elle a déjà dit qu’elle ne le ferait pas en mars. Le mois de mars n’est donc pas à l’ordre du jour. Toutefois, en fonction de l’évolution de l’inflation au cours des deux prochains mois, le mois de mai pourrait être retenu. La première baisse pourrait être envisagée à ce moment-là, mais pour l’instant, nous nous en tenons à notre prévision pour le mois de juin de cette année.
Chris Cooksey : D’accord. Concernant l’inflation, la Réserve fédérale craint évidemment que les taux baissent et que tout le monde se mette à rénover sa maison ou à consommer plus que de raison. Est-ce aussi simple que cela?
Eugenio Aleman : Cela représente un risque pour la Réserve fédérale. Si l’économie continue à si bien se porter, et ce, sans aucune aide de la part des prêteurs, que se passera-t-il si les taux d’intérêt diminuent et que les prêts entrent dans l’équation? Voilà ce qu’elle craint. Ce qu’elle ne souhaite pas non plus, c’est que l’inflation stagne aux niveaux actuels. C’est pourquoi les taux d’intérêt sont encore un peu désespérant. Et comme l’inflation diminue, les taux réels continueront à augmenter. Le risque subsiste donc, et ce, même si la Réserve fédérale n’agit pas au cours des deux ou trois prochains mois.
Chris Cooksey : Lors de sa participation au balado, Ed Mills a évoqué les mesures de stimulation budgétaire cachée et de nombreuses lois, telles que la loi sur les semi-conducteurs ou la loi sur la réduction de l’inflation, et il a expliqué qu’une grande partie de ces mesures était sur le point de se traduire dans l’économie, et j’aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.
Eugenio Aleman : En effet. C’est curieux, mais environ deux tiers des investissements réels sont des investissements non résidentiels et un tiers consiste en des investissements résidentiels. Les investisseurs résidentiels ont déjà subi tous les effets de la hausse des taux d’intérêt. Ils ont enregistré neuf trimestres consécutifs de croissance négative. La reprise s’est ensuite amorcée au troisième trimestre de l’année dernière, et le quatrième trimestre s’est également montré encourageant. Mais l’investissement non résidentiel a continué à suivre. Si vous vous penchez sur la construction dans le secteur manufacturier, comme la construction d’usines, les nouvelles usines pour les VÉ, les batteries et les puces, il s’agit d’une oasis d’activités qui ont la caractéristique, comme Ed l’a dit à juste titre, de ne pas avoir encore vraiment bénéficié de l’argent du gouvernement fédéral. Il s’agit donc uniquement d’investisseurs privés qui avancent de l’argent en espérant que la loi sur les semi-conducteurs, la loi sur la réduction de l’inflation et la loi sur les infrastructures viendront compléter leur apport. Je suis donc d’accord. Cette stimulation budgétaire n’est pas tant cachée que cela. Le véritable problème, c’est qu’elle n’est pas encore mise en œuvre. Je pense qu’il s’agit là d’un autre risque pour la Réserve fédérale. Pourquoi baisser les taux d’intérêt alors que la croissance économique est au beau fixe? Pourquoi mettre davantage d’huile sur le feu en diminuant les taux d’intérêt et en stimulant encore plus l’économie? Voilà la position de la Réserve fédérale aujourd’hui, et c’est une autre raison qui nous amène à penser qu’elle va demeurer sur sa position encore un moment.
Chris Cooksey : Oui. Je suppose qu’en matière d’emploi, comme vous l’avez mentionné, le taux de chômage est très bas, et vous savez cela bien mieux que moi en tant que spécialiste de la question, mais j’ai du mal à croire qu’avec un taux d’emploi si solide, la récession soit imminente si nous continuons à créer des emplois et à chercher des personnes pour occuper tous ces postes.
Eugenio Aleman : Je suis d’accord. Bien que toute économie puisse connaître des revirements spectaculaires, c’est généralement en cas de crise qu’elle s’effondre. Le risque de crise existe toujours : les entreprises sont inquiètes, elles pensent que la situation va empirer et elles commencent à licencier leurs employés. Je conviens toutefois qu’il n’y a aucun signe, du côté de l’emploi, d’un risque de récession de l’économie. C’est pourquoi nous estimons qu’il y a toujours matière à récession, car les risques de hausse des taux réels sont toujours existants et le resteront pendant quelques mois. Ces trois lois devraient cependant bientôt commencer à exercer leurs effets. Pour le moment, il est très peu probable que nous assistions à un ralentissement de l’économie, mais le risque de récession est toujours présent, du simple fait que les taux sont très élevés. Cela finira par avoir des répercussions sur l’activité économique.
Chris Cooksey : Sommes-nous parvenus au stade où les problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement auxquels nous avons fait face pendant la pandémie de COVID-19 ont été en grande partie résolus, ou en observons-nous encore les effets résiduels?
Eugenio Aleman : Les chaînes d’approvisionnement se portent bien. L’instabilité géopolitique mondiale, le conflit Russie/Ukraine, le conflit Israël/Hamas et les problèmes liés aux Houthis sont en train de remodeler l’industrie du transport et les coûts liés au transport augmentent. La principale différence entre aujourd’hui et ce qui s’est passé pendant la pandémie est que la production était à l’arrêt pendant la pandémie. Rien ne nuit à la production aujourd’hui. Certes, les coûts de transport peuvent augmenter, mais cela relève du détail. Ce n’est pas cela qui freinera le processus inflationniste aux États-Unis. N’oublions pas que près de 60 % des importations américaines proviennent du Mexique et du Canada et que ces itinéraires ne sont normalement pas empruntés, si bien que cela ne nuit pas au commerce entre les États-Unis, le Canada et le Mexique.
Chris Cooksey : Parfait. Imaginons maintenant que les choses se déroulent comme prévu et que les taux baissent en juin. Comment envisagez-vous le second semestre?
Eugenio Aleman : Si la Réserve fédérale commence à baisser les taux d’intérêt en juin, comme nous le prévoyons, nous aurons un second semestre très, très fort, et tous les paris seront alors ouverts. En règle générale, les marchés anticipent les événements. C’est donc peut-être ce qu’ils intègrent déjà dans leur comportement, et c’est pourquoi les marchés sont si forts aujourd’hui. Cela dit, il ne faut pas perdre de vue que les marchés restent des marchés. Qu’ils soient à la hausse ou à la baisse, je me méfie d’eux.
Chris Cooksey : Ils ne sont guère plus qu’une machine à voter, comme on dit. N’est-ce pas?
Eugenio Aleman : Oui. Je dis souvent que si les marchés prennent les ascenseurs, l’économie emprunte plutôt les escaliers. Le rythme de l’économie est beaucoup plus lent que celui des marchés.
Chris Cooksey : Parfait. Terminons par quelques points qui vous préoccupent et qui ne sont peut-être pas tangibles pour le moment, mais que vous surveillez pour vous assurer du bon développement des événements.
Eugenio Aleman : Oui. J’entends par là que nous sommes toujours préoccupés par ce que l’environnement politique aux États-Unis pourrait nous apporter. La situation est très préoccupante et c’est la première fois que ce genre d’événement se produit aux États-Unis. Personne ne sait donc exactement comment cela va se terminer, mais j’espère que tout se passera bien. Quant au secteur de l’immobilier commercial, il connaît toujours des difficultés, mais tout le monde en a conscience. Il est en difficulté depuis la Grande Récession. Il faut donc espérer que les organismes de réglementation sont au courant et que rien de mauvais n’adviendra. Nous pourrions donc connaître un scénario inattendu. Nous n’anticipons pas de surprise, mais c’est bien là le principe de la surprise : on ne s’y attend pas. Pour le moment, nous estimons que l’activité économique pourrait ralentir et évoluer vers une récession très, très légère. Si la Réserve fédérale entreprend de réduire les taux d’intérêt, je pense que nous pourrons éviter une récession, même légère, cette année, et que la situation s’améliorera par la suite.
Chris Cooksey : Nous suivrons attentivement l’évolution de la situation au nord de la frontière, car comme le dit l’adage : « Quand les États-Unis éternuent, le Canada attrape la grippe. » Nous veillerons à nous tenir informés de vos analyses et je tiens à vous remercier pour le temps que vous nous avez consacré aujourd’hui, Eugenio. Il est toujours très intéressant de discuter avec vous. Merci beaucoup.
Eugenio Aleman : Merci de m’avoir invité, Chris.
Chris Cooksey : Écrivez-nous à l’adresse advantagedinvestorpod@RaymondJames.ca. Abonnez-vous à L’Investisseur avantagé sur Apple, Spotify ou tout autre site de balados. N’hésitez pas à communiquer avec votre conseiller si vous avez des questions. Au nom de Raymond James et de L’Investisseur avantagé, je vous remercie d’avoir pris le temps de nous écouter aujourd’hui. À la prochaine. Portez-vous bien. Ce balado est offert uniquement à titre informatif. Les données statistiques, factuelles ou autres proviennent de sources que Raymond James Limitée (RJL) croit fiables. Toutefois, nous ne pouvons en garantir l’exactitude. Raymond James Limitée n’assumera aucune responsabilité en ce qui concerne l’utilisation de ces renseignements. Le présent document a pour but de fournir de l’information générale; les renseignements qu’il contient ne doivent pas être considérés comme une offre ou une sollicitation visant la vente ou l’achat d’un produit ni être interprétés comme des conseils fiscaux. Les conseillers Raymond James ne sont pas des conseillers fiscaux, et nous recommandons aux clients d’obtenir l’avis d’un professionnel indépendant concernant les questions d’ordre fiscal. Les produits et services liés aux valeurs mobilières sont offerts par l’intermédiaire de Raymond James Limitée, membre du Fonds canadien de protection des épargnants. Les produits et les services liés à l’assurance sont offerts par l’intermédiaire de Raymond James Financial Planning Ltd., qui n’est pas membre du Fonds canadien de protection des épargnants.